Stabilité des prix d’assurance et solvabilité 2.

Plus 30 % c’est l’augmentation moyenne des primes d’assurance automobile au Royaume Uni en 2010. Ces chiffres paraissent incroyables à première vue pour un assureur français… En 2010 alors que les comptes des assureurs étaient sérieusement étrillés par de nombreuses catastrophes et que la sinistralité automobile était mauvaise aux dires de tous, les chiffres d’augmentation proposés et appliqués par les assureurs français oscillaient entre 3 et 5% pour l’assurance automobile.

Vérité en deçà de la Manche, Vérité au delà de la Manche : tous les assureurs disent que le marché britannique, du fait de la prééminence des courtiers et des sociétés de capitaux, est poussé à une plus grande volatilité que le marché français. Là-bas, évolutions rapides et volatilité sont la règle, ici le « lissage » à moyen terme fait partie des habitudes de marché tant pour les assureurs que pour les assurés. Ces derniers préfèrent des mouvements plus limités et plus prédictibles. Il n’est pas évident que les sauts tant à la hausse qu’à la baisse soient du goût du consommateur français. Mais les acteurs de l’assurance auront-ils le choix à l’heure de Solvabilité 2 ?

Au moment où l’heure approche de mettre en place solvabilité 2, la question des implications pratiques pour le marché de l’assurance commence à prendre du poids et complètent les débats plus théoriques sur l’appréciation du risque. Parmi ces questions, celle de l’influence de solvabilité 2 sur la stabilité des prix se pose de plus en plus. Dans quelle mesure solvabilité 2 peut-il pousser à une plus grande volatilité des prix ?

On peut évoquer deux raisons :

  • Solvabilité 2 impose une évaluation des provisions en « best estimate », évaluation plus proche de la réalité économique de la charge totale afférente à une année. Dans ces conditions le pilotage[1] du résultat par le lissage des provisions devient plus complexe.
  • Solvabilité 2 crée une volatilité des capitaux de solvabilité qui se répercute sur le calcul des prix.

Connaitrons nous dans ce cadre des mouvements de grande ampleur sur les prix d’une année à l’autre ? La réponse à ces questions peut largement dépasser le simple cadre technique et impliquer des changements dans les taux de fidélité des clients, l’adaptation des réseaux etc.

Au monde de « solvabilité 1 » dont on pourrait presque dire que tout était fait pour favoriser une stabilité des bilans, va succéder un monde « solvabilité 2 » où beaucoup concourt à créer une forte volatilité des bilans d’une année à l’autre. Imaginer un système de prix stable dans cet environnement revient à déconnecter les évolutions rapides du bilan des évolutions lissées du marché et à faire payer la différence par les actionnaires. Si cette solution peut être acceptable pour une mutuelle, elle est plus difficile à imaginer pour une société cotée.

Nous l’avons déjà dit : solvabilité 2 n’est pas qu’une affaire de chiffres. La directive va avoir un impact sur la manière même dont les sociétés d’assurance seront gérées, avec des conséquences visibles pour tous. Une plus forte volatilité des prix sur le marché de l’assurance français peut en résulter. Il convient sans doute que les forces de vente se préparent à une telle éventualité.

[1] Nous faisons l’hypothèse que les acteurs piloteront leur résultat sur une base « prudentielle ».