Scor vient d’annoncer une nouvelle acquisition en réassurance vie aux États Unis.
Après Transamerica en 2010, c’est au tour de GENERALI Re d’entrer dans le giron du groupe Scor, ce qui en fera le premier réassureur vie aux US.
Après une telle série qui a fait passer la part de marche de Scor vie aux US de 3 % à près de 33 % en moins de 10 ans, il est intéressant d’en comprendre les ressorts.
Cette progression est liée à la concentration très rapide des réassureurs vie aux états Unis, concentration liée à la décroissance du marché de la réassurance « décès ».
Cette décroissance est la conséquence à la fois de la stagnation du marché de l’assurance vie décès et d’un moindre recours des assureurs à la réassurance.
Ainsi, les ventes aux particuliers d’assurance « décès » (exprimées en capitaux couverts) sont passées de 1,753 milliard en 2002 à 1,700 milliard en 2012. Dans le même temps les cessions aux réassureurs ont chuté de 1,078 milliard à 461 milliard, soit une chute moyenne de 10% par an depuis 7 ans…
Comme souvent la concentration est la conséquence de la décroissance des affaires.
Des opérateurs comme RGA (le leader actuel du marché) ou Scor ont perdu 22% et 16% de matière assurable « décès » aux États Unis entre 2010 et 2011.
A quoi peut on attribuer cette perte de vitesse ?
Pour le marché des particuliers c’est sans doute la perte d’importance de l’assurance décès qui explique une relative stagnation des marchés. La baisse régulière de la mortalité se traduit mécaniquement par une baisse de primes.
Pour la réassurance, le changement date des années 2004/2005 où les moteurs traditionnels de la réassurance vie américaine se sont grippés :
- Les progrès en matière de sélection des risques par les réassureurs ont ralenti, leur expérience s’est transmise aux assureurs. Les grandes inventions des réassureurs des années 90 visant à améliorer la tarification par de nouvelles segmentations (non smokers, prefered ou super prefered pour les personnes en bonne santé) ont perdu leur nouveauté.
- Les besoins de financement des réserves réglementaires ont significativement diminué. La réglementation XXX des années 90 avait imposé une charge réglementaire de provisionnement importante pour les primes nivelées sur la durée du contrat. Les réassureurs s’étaient faits une spécialité de financer ces « sur reserves » par le transfert des engagements off shore et l’utilisation de lettres de crédit en représentation locale par milliards. La réduction des primes nivelées et l’accès à des capitaux moins chers ont diminué ces affaires.
- La fin de la concurrence sur les prix très intense dans les années 2000, à laquelle a fait place la volonté de restaurer les marges. La conclusion du deal Berkshire Swiss Re au début de l’année concernant la rétrocession de blocs d’affaires de cette période laisse entrevoir les pertes accumulées par certains opérateurs.
Ces trois raisons n’en recouvrent en fait qu’une : la réassurance vie n’obéit que peu à la volonté des assureurs de protéger leur résultat, contrairement à la réassurance non vie. Elle est plutôt la conséquence d’autres motivations. Le risque décès est particulièrement stable et tout assureur normalement instruit comprend à priori l’intérêt de ne pas le réassurer. Trois motivations peuvent l’amener à le faire :
> Céder des risques très atypiques (par leur historique médical, leur accumulation catastrophique ou leur taille).
> Financer des provisions ou de la production nouvelle, dans la mesure où les capitaux mis à disposition par le réassureur sont compétitifs.
> Profiter de tarifs du réassureur particulièrement intéressants.
En Europe, en dehors de la Grande Bretagne, ces trois motivations sont restées modestes, expliquant la taille limitée du marché de la rèassurance vie. Aux États Unis elles ont perdu de leur importance expliquant la décroissance du marché et sa concentration.