Comment les français utilisent l’assurance vie pour corriger la politique économique de leurs gouvernants

59 milliard de déficit en France à fin juin 2014, 63 milliard de primes d’Assurance vie à la même date… Il est évidemment tentant de faire le rapprochement, même si rien ne permet de le faire scientifiquement. Ainsi à un niveau purement macro économique la « Nation France » emprunterait environ autant qu’elle place en assurance vie.

En conséquence, pourquoi la France emprunte-t-elle ?

Certains y verront sans doute une preuve de l’efficience des marchés : aujourd’hui la France emprunte à l’étranger dans des conditions excellentes, jamais le taux des emprunts d’etat n’a été si bas, et prête à des taux plus élevés par le bais des bilans des compagnies d’assurance. D’autres y verront une « gesta dei per francos », ou un signe de la sagesse des français qui, se défiant de l’audace de leurs dirigeants en matière financière, préfèrent prudemment investir ce qu’on les force à emprunter. Quoiqu’il en soit tout se passe comme si la « nation France » recycle grâce à ses assureurs vie des capitaux bon marché que le monde entier lui fournit, pour des raisons pas toujours très claires. Pour caricaturer, la « nation France » a emprunté 83 milliard (son déficit hors refinancement) qu’elle a placés à hauteur de 57 milliard dans des contrats d’assurance vie (variation des provisions mathématiques et participations aux bénéfices en 2013 ).

Pour être vertueuse, cette situation exige d’obéir à quelques règles simples :

D’abord les assureurs français ne peuvent plus financer la dette française car celle ci est peu rémunératrice et est autrement mieux financée par le monde entier. Cette règle est un changement par rapport aux pratiques du passé et elle a été naturellement appliquée. La part des obligations françaises dans le bilan des assureurs français a été réduite. Elle représentait 460 md en 2003 soit 32% des placements des assureurs. Ceux ci détenaient selon la Banque de France 23% de la dette totale de la France. C’est une bonne nouvelle.

Encore faut il que les hommes politiques comprennent l’intérêt de cette situation et n’enfourchent pas les destriers du nationalisme économique. L’autonomie des assureurs en matière de placements doit rester, dans cette vision, pleine et entière.

Ensuite, la fiscalité ne doit pas détruire l’intérêt de cet « arbitrage ». Prêter au delà du taux de refinancement de l’état français c’est accepter de prendre des risques en terme de qualité de signature ou en terme de change. La prime de risque ne peut pas être intégralement absorbée par la fiscalité. Et l’état a tout à gagner à ce que ces citoyens investissent directement ou indirectement dans les économies françaises et étrangères.

On ne saurait conclure de ce propos qu’il est bon d’être en déficit et qu’il convient de continuer dans cette voie dangereuse. Mais si l’on s’est résigné, comme moi, à l’idée que la classe dirigeante de ce pays est incapable de réduire la dépense publique[1] et partant les déficits, un moyen d’atténuer les effets néfastes de la situation est le renforcement de l’assurance vie. Seul le maintien d’une épargne forte gérée dans un véhicule moderne et ouvert sur le monde est à même de limiter la casse. Montesquieu a dit dans les lettre persanes, en faisant référence à la vente de titres nobiliaires par notre Roi : « (le Roi) tire (ses richesses) de la vanité de ses sujets, plus inépuisable que les mines. » il semblerait plutôt aujourd’hui[2] que « la République tire ses richesses de l’instinct d’épargne des français » Espérons que ceux qui nous gouvernent l’aient compris…

[1] Confer. les déclarations récentes de M. Sapin sur l’inflation et la réduction des dépenses publiques.

[2] Même si la distribution des médailles n’est pas finie…

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