Un contrat euro aux nombreuses vertus…
Selon Allianz et Generali, la grande époque du contrat euro est terminée parce que l’intrusion des taux d’intérêt dans des zones négatives condamne les trois ingrédients qui ont fait le succès de cette forme d’épargne : rendement, disponibilité, sécurité.
Le constat est peut être vrai, mais on peut rester prudent quant aux solutions proposées et leurs conséquences possibles.
Pour répondre à cette fin annoncée d’un ancien monde (annoncer la fin du monde est très à la mode aujourd’hui), Generali et Allianz proposent des solutions radicales, fondées sur l’arrêt ou la limitation de la commercialisation des produits en euros, la promotion de l’Euro-croissance…
Mais ces solutions n’ont rien de neuf et les assureurs vie s’y essayent depuis plus de 20 ans. Remplacer le contrat en euro par les unités de comptes ou des choses qui y ressemblent est dans la tête de tous les assureurs vie depuis un moment. Cela les a conduit à défendre des produits aussi peu vendables que l’Euro-diversifié ou l’Euro-croissance par un lobbying intense, dans l’espoir que seule une réglementation contraignante forcerait les clients à les acheter. Voilà de nombreuses années que le « contrat Euro Roi » dont on nous annonce régulièrement la fin nécessaire, résiste et n’en finit pas de ne pas mourrir.
J’explique pour ma part depuis longtemps que le produit en Euro n’est pas aisé à déboulonner. Il tire sa force d’avoir été conçu par un commerçant, Gérard Athias, qui était aussi un visionnaire et un homme d’assurance. Si ses qualités pour le client sont bien connues, il est un autre aspect qu’il conviendrait de ne pas négliger dans l’élaboration des solutions futures.
Avec le contrat en Euro à versement libre, G Athias a donné à l’assurance vie des lettres de noblesse qu’elle n’avait pas. L’assurance épargne du début de ma carrière est un métier marginal à la réputation sulfureuse, renforçant, à tort ou à raison, la réputation traditionnelle de l’assureur qui ne rembourse rien des sommes qu’on lui a confiées, pendant en assurance vie de l’assureur IARD qui ne paie pas les sinistres.
À un système tout fait de contraintes (engagement à long terme, escompte de commissions, donc faible valeur de rachat, assurance mixte) dont la conséquence pratique était de ne laisser rien ou presque au malheureux qui ne pouvait poursuivre son effort d’épargne jusqu’au terme, le produit Euro proposait des frais plus explicites, des participations bénéficiaires substantielles et une disponibilité permanente. De quoi faire passer l’assurance vie épargne du statut de produit mal considéré (ou ignoré) à celui de « placement favori des francais ».
Abandonner le produit Euros, c’est peut être faire de l’assurance vie à « haut risque d’image ». Tous ceux qui ont vendu des contrats en unités de compte savent qu’il ne s’agit pas d’un long fleuve tranquille et que les crises boursières sont loin d’être absorbées avec sérénité par les assurés. Le défaut de conseil peut rapidement être invoqué, à tort ou à raison, en cas de perte substantielle. En un mot, le « contrat Euro Roi » n’a pas seulement rendu riche et centrale une industrie autrefois marginale, il a aussi permis par sa structure même de renverser l’image de l’assurance vie dans l’opinion. Lorsqu’ils parlent de l’abandonner, les assureurs devraient ne pas l’oublier.